Dans les pièces en enfilade jusqu’au Grand Salon traînent les trajectoires sans but des malades, éparses, les arrêts, les stations sans raison : les effondrements soudains de l’intention. Certains trajets, il n’y a que les limites du bâtiment pour les arrêter. Il arrive qu’un pensionnaire reste devant un mur longtemps. On vient le chercher au bout d’un moment. Venez.
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La vie sans heures. Des moments sur les sièges ou les marches du Château, ou sur les bancs autour de la pelouse.
Le salut de la cloche deux fois par jour, ultime radeau où accrocher son corps, irruption du temps des normaux sur cette immensité où le désir se noie. La cloche ponctuelle, fiable et chaleureuse actionnée par un Pensionnaire délégué par René, pleine de la promesse du repas, d’une rencontre organique avec son être.
La confusion du Château, après ceux des contes de fées et les princes dans les livres illustrés.
La vie de château.
Ce Château. C’était la présence impénétrable des Pensionnaires assis ou debout, affaissés dans un coin sur des chaises de collectivité.
Cette suspension étrange de l’accomplissement, cet égarement de la réalisation.
Cette attente absolue. Avec le temps et l’air comme assis sur eux. L’air aussi dense que l’eau, l’air transformé en béton, comme l’eau se transforme quand on chute d’une certaine hauteur.
Le sens caché des gestes, le visage ingouvernable, et devant les regards l’horizon plus lointain que celui de la géographie ordinaire.
La complication du dialogue ; la parole intempestive.